
Le mot grec trôglodutes est formé des racines trôglé, caverne, et dýeiê, pénétrer, plonger; il signifie donc qui pénètre (qui vit) dans des cavernes. Selon les dictionnaires français, le mot troglodyte désignait à l’origine divers peuples plus ou moins légendaires de l’Antiquité qui vivaient dans des cavernes ou, par extension, des personnes habitant sous terre.
C’est donc ainsi que le nom troglodyte (tout court) a fini par désigner aussi un oiseau qui place souvent son nid de mousse dans une cavité de mur, d’arbre ou de falaise; en l’occurrence il s’agissait du Troglodyte mignon (Troglodytes troglodytes), seule espèce de la famille qui soit présente en Eurasie.
Buffon lui-même reprend le nom employé par les Anciens (dont Aristote, 384-322 av. J.-C.) et intitule ainsi l’un des chapitres de son Histoire naturelle des oiseaux (1856) : Le troglodyte, vulgairement et improprement nommé roitelet. Selon lui, cette confusion vient de ce que les deux oiseaux ont en commun leur petite taille.
Le Troglodyte mignon semble avoir joué un rôle de premier plan dans le folklore des pays francophones. Littré ainsi que Cabard et Chauvet nous gratifient d’une longue liste d’autres noms populaires aussi descriptifs que savoureux :
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Bérichon (peut-être un doublet de berrichon, originaire du Berry, au centre de la France? Mais l’espèce a une distribution beaucoup plus vaste);
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Fourre-buisson ou fourbisson (d’après l’habitat qu’il fréquente généralement);
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Bœuf (allusion à sa forme arrondie, semble-t-il, nom à rapprocher de bouvreuil, nom d’un autre oiseau);
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Noisette, châtaigne (à cause de sa forme et de sa couleur brune);
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Écouteux (autrement dit espion, parce qu’il sait s’approcher discrètement des humains);
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Souris des haies, petit rat, rat de buissons, ratillon, ratelet (à cause de son aspect général et parce qu’il vit près du sol);
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Troussequeue ou troussepet (parce qu’il a l’habitude de relever la queue);
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Roi des oiseaux, roi Bertaud (un bertaud serait un buisson) ou ses variantes rabortiau et roi Bertrand; roitelet à queue de poule; contrairement à Buffon, certains auteurs considéraient effectivement que le troglodyte était le « vrai » roitelet (roi des oiseaux);
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Dans le même ordre d’idées, empereur, monarque, président.
Les qualités royales du troglodyte sont également reflétées dans son nom en allemand (Zaunkönig, roi des haies) et en néerlandais (winterkoning, roi de l’hiver, parce qu’on n’entend que lui pendant cette saison). Quant à l’anglais wren, il viendrait d’une vieille racine germanique qu’on retrouve dans plusieurs langues nordiques, mais son étymologie reste mystérieuse.
Sources
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Avibase, la base ornithologique mondiale, https://avibase.bsc-eoc.org/checklist.jsp?region=NL&list=howardmoore, consulté le 29 février 2024.
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CABARD, Pierre, Bernard CHAUVET. L’étymologie des noms d’oiseaux. Belin Éveil Nature, 2003.
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Dictionnaire le Littré 2.0.
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https://www.larousse.fr/ , consulté le 29 février 2024.
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Le Grand Robert de la langue française, version électronique, 2001.
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Œuvres complètes de BUFFON, avec des extraits de Daubenton et la classification de Cuvier, Adolphe Delahays, Libraire, Paris, 1856, https://books.google.ca/books?id=9GNqop_IPooC&pg, consulté le 29 février 2024.
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WALTER, Henriette, Pierre AVENAS. La mystérieuse histoire du nom des oiseaux, du minuscule roitelet à l’albatros géant. Robert Laffont, 2007.